Balenciaga, l’oeuvre au noir

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Parfum de mystère alchimique autour du titre de l’exposition Balenciaga au Musée Bourdelle (Galliera hors les murs).

Si le lieu se prête admirablement au jeu de la confrontation entre mode et art, ce n’est pas une première. Les salles du musée avaient déjà servi magnifiquement d’écrin à l’exposition des modèles de madame Grès.

Né en Espagne, Cristobal Balenciaga apprend le métier de tailleur et ouvre sa première maison en 1917 à San Sebastian. Plusieurs maisons suivront. Mais la politique en Espagne le conduit à quitter son pays en 1936. Installé à Paris, il y ouvre sa maison en 1937. Son style s’affirme, s’impose, architecturé, construit. Il imagine sa ligne Tonneau en 1947.  En 1958, il dessine sa première robe sac. Il crée en 1960 la tenue de mariée de la future reine Fabiola de Belgique. Après une dernière collection présentée en 1968, la maison est fermée et le couturier repart pour l’Espagne.

Veste et jupe. Tailleur

Au musée Bourdelle s’instaure un dialogue entre la géométrie architecturée des vêtements et la puissance des sculptures. Ainsi le Grand guerrier face à une robe ou le Centaure mourant et deux vêtements en suspension.

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Ébauches et construction dessinent une approche de l’oeuvre en devenir avec des patronages, des toiles prêtes à être découpées. Les repères signent les lignes de découpes ; juste crayonnées en blanc, les piqûres pour la machine ; les couleurs pour les aplombs. Des dessins, des silhouettes, ébauches d’un style.

27. illustration robe 1967

Coupes strictes des tailleurs, des manteaux, volume des capes, mais aussi importance du chapeau qui ponctue la silhouette, la surplombant avec élégance.

Chapeau

Le choix du noir est chez Balenciaga une évidence. Majestueux, il s’impose avec force. Place à la forme, l’oeil n’est pas distrait par la couleur et se centre sur le style.

En 1938 Harper’s Bazaar notait : « Ici , le noir est si noir qu’il vous frappe comme une gifle, c’est un noir épais, espagnol, presque velouté, c’est une nuit sans étoiles, tout autre noir paraît presque gris ».

Balenciaga s’attache à des tissus qui ont du caractère, les travaillant dans leur complexité, explorant, exploitant leurs particularités. Le choix des tissus induit les formes, les coupes, ainsi le gazar avec des plis, le taffetas chiffonné, le crêpe pour le mouvement… Avec l’architecture des formes, la géométrie, le vêtement va vers l’abstraction, oubliant le corps pour juste l’envelopper, quitte à le masquer.

50 nuances de noir avec formes structurées, noir drapé, dans des jeux d’ombre et de lumière. Quant à la transparence suggérée par les dentelles, elle fait vibrer la non couleur et dessine un lien avec le pays d’origine du couturier.

Robe

En opposition au noir, son pendant, l’autre non couleur aussi s’exprime mais juste en touches. Un éclat de blanc en étole sur les épaules, en tissu drapé sur l’encolure. Une pointe de rose en ponctuation, en ceinture nouée.

Robe

Le noir de Balenciaga se situe entre deux mondes. Entre le noir d’une tradition historique qui va des vêtements d’un modeste clergé à des tenues de deuil en Occident et le noir de la mode contemporaine révélé notamment par la puissance créatrice des designers japonais depuis les années 80 en passant par la case anarchique du punk.

Pour Balenciaga : « Un bon couturier doit être architecte pour les plans, sculpteur pour la forme, peintre pour la couleur, musicien pour l’harmonie et philosophe pour la mesure ».

Un monde majestueux à découvrir au musée Bourdelle.

 

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Photos in situ Pierre Antoine

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