Curieux intitulé que celui de la dernière exposition du FIT de New York consacrée aux « black fashion designers ». L’idée est venue suite à l’agacement d’un designer, Kerby Jean-Raymond (après sa collection printemps été 2016) de se voir en permanence qualifié de « black designer » considérant que cette appellation était un peu limitée !
La représentativité de designers répondant à cette appellation est très faible sur le site de voguerunway.com avec une présence à hauteur de 1%.
Le FIT a choisi de rassembler ces designers au travers de différents thèmes très classiques : soir, mode masculine, street style… avec un espace dévolu aux influences ethniques du continent africain.
L’exposition remonte dans le temps jusqu’à l’époque où déjà à la fin des années 40 quoique encore sous la ségrégation sont apparus des designers « blacks » qui ont eu un certain succès : Zelda Wynn Valdes et Ann Lowe. Des couturiers qui annoncent la transition vers ce qui va devenir la mode des créateurs.
Dans les années 60 Arthur Mc Gee, Wesley Tann et Jon Weston ont tous travaillés pour d’autres avant de lancer leurs marques. Weston disait « J’ai été aussi loin que j’ai pu sur la 7eme avenue, mais elle ne grandissait pas avec moi ».
Dans les années 70, les blacks designers deviennent même sous cette appellation, très « fashionable » avec Willi Smith, `Stephen Burrows et Scott Barrie au style body conscious. Et puis la mode passa. Willi Smith explique : »When the hype was over, people thought there were no more black designers. In a way it’s a blessing. Now we can get on with being what we are : designers ».
Eric Gaskins, qui a appris son métier avec Hubert de Givenchy s‘est mis lui à créer dans la tradition de la couture ainsi des robes blanches traversées de traits comme au pinceau pouvant faire penser à Franz Kline.
Joe Casely-Hayford ajoute un côté un zeste anarchique à une mode so british.
Américain, Patrick Kelly a eu sa carrière météorique mais remarquée en France (décédé à l’âge de 36 ans en 1990). Il a beaucoup utilisé les boutons en souvenir d’une pratique de sa grand-mère qui récupérait ce qu’elle trouvait et renouait avec ses racines. Il a ajouté fantaisie et humour à nombre de ses créations. En référence à son « patrimoine », il en a joué avec audace faisant défiler Pat Cleveland façon Joséphine Baker avec jupe ceinture de bananes. Et pour logo et emballage, il n’a pas hésité à réinterpréter une figure de golliwog. À l’époque de sa gloire il fut accusé aux États-Unis de promouvoir des stéréotypes racistes. Dans une interview au Time il dit : » Je ne suis pas le « Grand espoir noir ». Mais c’est comme dit la chanson. Tu te sers de ce que tu as pour obtenir ce que tu veux ».
Duro Olowu, Nigérien jamaïcain basé à Londres a choisi lui de s’inspirer de l’Afrique.
Quelques modèles proposent une mode activiste avec des messages politiques et sociaux. Photo du magazine anti apartheid Drum sur des modèles du Sud Africain Nkhensani Nkosi.
Kerby Jean Raymond, inspiré par l’histoire d’Ota Benga, un africain du 19es enferme dans la monkey House du Bronx redessine ainsi un lien avec un passé douloureux.
Au final une exposition qui permet de faire le point sur le sujet et de conclure que la création est plus le fruit d’études, d’apprentissage et du lieu dans lequel on évolue plus qu’une couleur de peau. Mais la question méritait d’être posée…