Spectaculaire, l’exposition Christian Dior* retrace l’aventure d’un créateur hors norme à l’origine d’une maison prestigieuse. Du tailleur bar à aujourd’hui en passant par les cases parfums ou maquillage, itinéraire d’une maison française en admirant 300 robes de couture, des accessoires, des photos, des patronages, l’esquisse d’un atelier. 3 000 mètres carrés d‘exposition à voir, même pour les réfractaires à la mode.
Un couturier
Née sous une bonne étoile (trouvée par le couturier en 1946 à la veille d’une rencontre capitale avec Marcel Boussac), la maison Christian Dior a été fondée en 1947. Dès le départ inscrite dans son époque, la maison tourne la sombre page de la guerre et, en réaction, utilise des métrages de tissu insensés. Christian Dior imagine une silhouette qui marquera les esprits. L’intitulé Corolle de sa collection de femmes fleurs passera à la postérité avec l’expression de la journaliste américaine Carmel Snow (Harper’s Bazar) qui choisit avec enthousiasme le terme de New Look. Christian Dior expliquait : « J’accusais la taille, le volume des hanches, je mis en valeur la poitrine. Pour donner plus de tenue à mes modèles, je fis doubler presque tous les tissus de percale ou de taffetas, renouant ainsi avec une tradition depuis longtemps abandonnée. » Emblématique, le tailleur Bar (passé à la postérité avec un cliché de Willy Maywald) associe une veste en shantung blanc cassé à basques sur une ample jupe noire évasée et agrémentée de plis. En parallèle à la silhouette Corolle, une forme en 8 où les jupes jouent l’étroitesse d’une tige. Avenue Montaigne les collections se succéderont avec succès jusqu’au décès du couturier en 1957.
De 1957 à aujourd’hui
Six créateurs en 60 ans ont marqué de leur patte l’histoire de la maison.
-Jeune assistant remarqué, Yves Saint Laurent prit la succession de Christian Dior mais pour très peu de temps (confronté à des obligations militaires). Il présenta avec succès en 1957 sa première collection Trapèze pour le printemps été 1958. Ligne courbe pour l’automne hiver 1958 et une dernière collection en 1960. En quelques saisons les prémices de son grand talent ont déjà pu s’exprimer.
-En poste chez Dior à Londres, Marc Bohan prend la succession en 1960. Un travail classique, mais couronné deux fois par un Dé d’or en 1983 et en 1988.
-Avec son exubérance italienne, Gianfranco Ferré présente sa première collection en 1989-1990 et recevra lui aussi un Dé d’or la même année.
-La grande révolution sera l’arrivée en 1996 de John Galliano qui insufflera une vie nouvelle et flamboyante à la belle endormie. Diplômé de Saint Martin’s et déjà créateur de collections extraordinaires sous son nom, John Galliano aura avec Dior toute latitude pour le déploiement de son talent. Une décennie fabuleuse servie par une inspiration multi facettes traduite avec le savoir faire d’exception des ateliers. Ses collections demeurent des souvenirs remarquables et revoir ces modèles constitue un des grands moments de l’exposition.
Belge diplômé de l’Académie d’Anvers, Raf Simons créa d’abord sous son nom et fut directeur artistique quelques années chez Jil Sander avant de succéder à John Galliano dans un style plus épuré, architecturé, voire minimaliste.
En 2016, une nouvelle page se tourne avec l’arrivée d’une femme, Maria Grazia Chiuri qui s’était fait remarquer par le succès de son binôme chez Valentino.
L’exposition
La mise en scène de Nathalie Crinière se dessine autour de thèmes, de lieux : une galerie d’art, un atelier, une rue, un boudoir, un jardin… Des souvenirs de l’enfance, des lieux qui ont compté dont Granville, la Colle noire… Le dessin d’un parcours artistique de galériste… L’amour ds jardins, des fleurs… Autant de points d’ancrage de la future maison.
Des « Coloramas » en camaïeux autour du mauve, rouge, vert, jaune… réunissent vêtements, accessoires et parfums d’un couturier qui, en visionnaire, avait déjà inscrit ls fragrances dans le début de son histoire. Et aussi en écho le travail des trois grands maquilleurs maison : Serge Lutens, Tyen et Peter Philips.
L’intérêt du couturier pour les jardins, les fleurs se retrouve amplifié par le choix d’un décor de fleurs de papier ( Wanda Barcelona).
Le tailleur Bar ouvre la voie à la grande nef qui met en valeur les tenues de haute couture les plus fastueuses parfois portées par des personnalités célèbres (Grace de Monaco, Lady Diana, Charlize Theron…). Le tout étoffé par des croquis, des documents et des photos. Des espaces annexes se consacrent aux différents directeurs artistiques de la maison. Dans le parcours s’enchevêtrent chronologie et thèmes.
Une délicieuse plongée dans le temps, 70 ans de création d’une grande maison.
* Au Musée des Arts décoratifs de Paris jusqu’au 7 janvier
-C Emma Summerton
-William Klein, Dorothy + Little Bara with a cello, Paris 1960, robe Moderato Cantabile, collection haute couture automne-hiver 1960. Vogue US, 15 septembre 1960, modèles Dorothy McGowan et Little Bara © William Klein
–YSL Pour Christian Dior Robe Bonne conduite PE 1958. Ligne Trapèze. Robe blouse en lainage granité de Rodier. Paris, Fondation Pierre Bergé – Yves Saint Laurent. © Photo Les Arts Décoratifs / Nicholas Alan Cope
-John Galliano pour Christian Dior, Ensemble Shéhérazade, haute couture printemps-été 1998. Ensemble du soir kimono inspiré des Ballets russes, ligne pyramide, à grand col cheminée en velours de soie, applications, broderies et incrustations de cristaux Swarovski. Robe longue fourreau en double satin. Paris, Dior héritage © Photo Les Arts Décoratifs / Nicholas Alan Cope
– Raf Simons pour Christian Dior, haute couture automne-hiver 2012.Robe du soir en satin duchesse jaune imprimé chaîne d’après la peinture SP178 de Sterling Ruby. Paris, Dior héritage © Photo Les Arts Décoratifs / Nicholas Alan Cope
-Maria Grazia Chiuri pour Christian Dior, tailleur Rêve infini, collection haute couture printemps-été 2017, veste Bar à double basque plissée, pantalon plissé soleil, Paris, Dior héritage © Photo Les Arts Décoratifs, Paris / Nicholas Alan Cope
-Présentoir Miss Dior, inspiré du Temple de l’amour au Petit Trianon de versailles, 1950 © Philippe Schlienger
-Peter Lindbergh, robes Kusudi et Kitu, collection haute couture printemps-été 1997, modèles Kiara Kabukuru et Debra Shaw © Peter Lindbergh
CHRISTIAN DIOR était, sans aucun doute, poète mais très XIXè et Proustien, en oubliant la FEMME au contraire de Chanel? BOHAN a fait du beau travail dans la discrétion et le maintien des savoirs faire. Galliano également dans la folle exubérance, un brin Poiret, un brin Vionnet (dit il), quelques brins de DIOR et beaucoup (trop?) de bling. Depuis, je vois un néant abyssal, une machine huilée LVMH (ce qui n’est pas un défaut, loin de là, mais ne convient ni à la couture, ni à la poésie, il me semble?)
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Oui pour Christian Dior dans le cadre de son époque. Et 100 fois oui pour Galliano…
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